Il y a des chiens partout dont certains
sont fort mal en point : blessés, infirmes,
malformés, malades ou malnourris
(ainsi que beaucoup de bien portants),
ils font peine à voir et pourtant,
puisque c'est là ce que la vie produit,
ce qui résulte des forces naturelles
dont dépend toute notre existence,
peut-on regretter qu'ils subsistent ?

De cette portée de chiots fallait-il
supprimer celui qui n'a que trois pattes ?
Certes, il tarde un peu à suivre ses frères
et doit se contenter de moindres repas,
mais aurait-il été mieux pour lui de ne pas être là ?
Celui-là émacié dont la gorge suppure
sans recevoir de soins n'a plus longtemps à vivre :
à quel moment le fallait-il occire ?

Tous vont mourir et que ce soit
demain ou après-demain,
la différence n'est pas grande.

Puisque tout doit mourir, a-t-on le droit
de refuser la vie au moindre individu ?

Est-ce horrible ou bien
terriblement émouvant ?

C'est triste pour des eugénistes,
qui ne veulent voir de la race
que les exemples les meilleurs,
mais c'est beau pour des croyants
qui célèbrent la vie sous toutes ses formes,
tragiques toutes et dignes d'amour.

À présent appliquons ces propos
également à des êtres humains.

(On pourrait, aussi, ramasser les ordures,
ce qui en réduirait grandement le nombre,
puis choper les derniers et les exécuter –
je vous laisse deviner si je parle
des enfants ou des chiens.)

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