J'aime les hôpitaux la nuit :
espaces vides à demi sombres ;
sentiment du veilleur qui n'attend rien
d'extérieur, mais seulement l'accomplissement,
sujet à des horloges capricieuses,
intérieur du destin de chacun ;
patience et abnégation.

On partage des vivres rares,
des paroles précieuses,
un inconfort une fatigue motivés
par l'importance de l'enjeu :
tout ce qui fait l'intérêt des guerres
et des voyages aventureux
sans avoir besoin de tuer quiconque
car c'est nous qui mourons tout seuls
ou de se trouver d'autre destination
que la naturelle.

Surtout, sortis de la routine,
on se sent moins banals, moins protégés :
une personne compte pour une vie,
ce qui est beaucoup et très peu
à saisir pleinement tout en sachant qu'on va la perdre,
mais mieux que de compter pour un salaire,
un costume ou une attitude.

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